Le Cinquième Beatles

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album-cover-medium-21349Par Mathieu T

Je dois vous avertir d’emblée, je perds tout sens critique quand il s’agit des Beatles. Je me sens comme le nigaud sur la colline à la recherche du champ de fraises. Je peux vous parler pendant des heures des boucles sonores de Tomorrow Never Knows ou des harmonies vocales de Girl.

Ceci dit, j’ai placé Abbey Road sur ma table tournante et plongé dans le livre comme un phoque dans l’eau glacée. Et j’ai tout oublié, les impôts en retard, la vaisselle sale, la maudite pluie, tellement l’histoire de Brian Epstein est fascinante et racontée avec brio, sans chichi, historiquement réaliste mais aussi pleine de douce et amère poésie à l’image de la personnalité complexe de Epstein.

Mais qui est-il au juste ? Un docteur ? Un percepteur ? Un postier ? Si vous questionniez le quidam sur le cinquième Beatles, il vous répondra probablement Georges Martin ou Yoko Ono. Pourtant, Epstein, premier gérant du groupe, fut l’homme derrière le succès du Fab Four. Il les a découverts au fin fond de leur caverne comme Christophe Colomb a découvert l’Amérique et a permis à nous, simples mortels, de connaître la joie ultime d’entendre She Loves You.

De la signature du premier contrat à la pochette de Sgt. Pepper’s, Brian Epstein a été de tous les combats, navigant dans une industrie féroce avec une surprenante naïveté et une énergie sans limite. Il croyait en eux et dès la première seconde où il les a entendus, il a su que son destin était de mener les Beatles au succès planétaire. D’ailleurs, l’auteur fait un parallèle fort réussi entre la vision de Epstein et sa passion pour les corridas.

Ce récit aurait pu être celui de la gloire : l’argent, les minettes, les belles voitures, les sous-marins, la grosse vie. Mais non. Brian Epstein devait se battre aussi contre ses propres démons. D’abord, il était issu d’une famille juive aisée qui possédait plusieurs commerces dont un magasin de disques. Malgré la découverte des horreurs de la Deuxième Guerre mondiale, le Juif en Europe dans les années 60 était encore vu avec un œil, disons, méfiant. En plus, et c’est un détail majeur de sa personnalité trouble, Epstein était homosexuel, ce qui était complètement illégal en Angleterre. La difficile scène d’ouverture nous révèle en images toute la misère de cette vie de paria.

Justement parlons dessins. Robinson et Baker nous offrent un tour de manège magique. Les représentations des Beatles et d’Epstein sont ressemblantes tout en gardant une part d’interprétation. Le cadrage est somptueux avec des pages blanches et noires, les couleurs sont vives et le trait est le fruit de bédéistes et d’illustrateurs. Les deux hommes n’ont pas eu peur non plus de décrocher pour accentuer les moments de tensions ou de drôleries. Nous avons carrément l’impression d’être assis à côté de cette supposée actrice dans Drive my car.

Bon, je m’arrête ici. Est-ce le premier 10/10 de Bdmétrique ? Malheureusement non, car la traduction franchouillarde de Dargaud gâche un petit peu la sauce. Mais ne vous privez pas de découvrir ce fabuleux destin si bien raconté.

9,5/10

Le Cinquième Beatles

Auteurs : Vivek J. Tiwary (scénario) Andrew C. Robinson et Kyle Baker (dessins et couleur)

Éditeur : Dargaud 2013

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