En voilà un magnifique BDVNI (bus dessiné volant non-identifié).
Paul Kirchner débuta sa carrière de créateur de comic strips dans le cultissime magazine pornographique Screw. En 1978, il proposa à l’hebdomadaire Village Voice de New York une série régulière de demi-pages mettant en scène un bus et son passager anonyme. Réponse du rédacteur en chef: « c’est la meilleure chose que j’aie jamais refusée ».
Direction Heavy Metal, où l’éditrice, Julie Simmons, cherchait justement des demi-pages pour combler les espaces vides à côte des publicités, un peu comme lorsque Musique Plus, à la fin du XXe siècle, finissait les heures où il manquait un peu de matière (bref, toutes les heures) par les deux minutes parfaites de Song 2 de Blur.
Revenons à ce bus, dont les fantastiques aventures ont été republiées par les éditions Tanibis. Kirchner insiste pour qu’il n’y ait aucune majuscule au nom de son opus. Il termine aussi le bus en queue de poisson, car il s’était rendu compte que sa série « n’avait aucun sens » (ah oui ?). Mais derrière cette modestie, il y a l’âme d’un génie, d’un poète, d’un contemporain de Gotlib et des Monty Pythons, qui n’a rien à leur envier. Le lecteur a dans les mains un bijou d’humour absurde, où chaque histoire tente de repousser les limites de la boutade (la bus-tade ?). En parcourant le bouquin, on se demande même si certaines histoires au design hypnotique et au dessin très noir et blanc n’ont pas inspiré Marc-Antoine Mathieu ou même Michel Gondry car certains strips semblent changer de décor dans un monde de plus en plus surréaliste.
En résumé, ce livre est un énorme coup de cœur. Et si je ne vous ai pas encore convaincu de vous précipiter à l’arrêt de bus le plus proche pour aller chercher ce livre à votre librairie préférée, voici quelques morceaux choisis :
9/10
le bus
Auteur : Paul Kirchner (scénario et dessins)
Éditeur : Tanibis (2012)
84 pages