Je me souviens qu’il y a quelques années, en 2009 pour être précis, un copain m’avait prêté Miam miam fléau du sieur Marsi. J’avais été fort impressionné par cette production québécoise qui sentait bon l’univers décalé des Philémon des premiers jours. Je m’étais promis de suivre cet auteur original puis, comme c’est le cas pour bien des gens qui sortent de notre orbite sans tambour ni fanfare, je l’ai oublié.*
Voilà que Marsi revient dans mon univers avec sa deuxième bande dessinée publié à La Pastèque. J’ai parfois la vilaine habitude de feuilleter une bédé avant de la lire (je fais du vent avec les pages, mon œil s’arrêtant subrepticement sur quatre ou cinq dessins) et Colis 22 n’y a pas échappé. À la page 59, une seule case et un superbe plan d’une chambre d’appartement. Tous les détails sont présents : la brosse à cheveux sur le bureau, le radiateur à eau chaude, les motifs du tapis. Un peu pantois, j’ai fermé le livre et regardé plus attentivement la page couverture du bouquin. Le même soin du détail s’y retrouvait. Satisfait, ma lecture pouvait commencer.
Pluton est livreur à vélo et sillonne les rues de Québec pour la compagnie Système So. Il est le type même du bon gars qui possède le don de se mettre les pieds dans les plats. Il se retrouve alors avec un colis inlivrable, le colis 22. Soudain, des alertes à la bombe sont lancées un peu partout et des malfrats, armes au poing, veulent mettre la main sur le paquet. Mais que contient-il au juste ?
Marsi a concocté un bon petit polar dont la force n’est pas tant le récit lui-même, la fin étant vraiment alambiquée, que les personnages qui le parcourent : le héros, assez sympathique et assez tête dure pour être crédible, la blonde attachante et achalante, le copain philosophe propriétaire d’un magasin de vélos, Nix, le chien errant, les bandits légèrement bouffons.
Toutefois, j’aurais aimé que l’esprit ludique de Marsi prenne le dessus sur cette histoire pas si folle que ça. Il y a quelques dialogues qui alourdissent la lecture alors que certaines images nous parlent davantage. J’aurais aimé que les personnages soient transportés par cette force absurde, même légère, qui avait si bien fait mouche dans son fléau.
Le trait de Marsi a fait beaucoup de chemin depuis 2009. Ses dessins se situent aujourd’hui entre ceux de Frank Le Gall et de Bruno Heitz, et offrent des bonbons à tous les amoureux de la ville de Québec. Son choix du noir et blanc sied très bien à cette explosion contrôlée de détails et à l’esprit policier du livre. L’auteur a un outil extraordinaire entre les mains et il ne doit pas le retenir. Il doit aller au bout de son talent. C’est ce qui fait sa force.
7,5/10
Colis 22
Auteur : Marsi
Éditeur : La Pastèque (2014)
160 pages
*=Ce qui n’est pas tout à fait vrai puisque Marsi faisait parti des artistes qui ont exposé au Musée des Beaux Arts de Montréal pour les 15 ans de La Pastèque à la fin de 2103 et au début de 2014. Du beau travail.
Une critique qui fait réfléchir, très intéressant pour moi qui ai lu l’album.
J’apporte une précision au parcours de ce bédéiste que je suis de près ;-), il a fait paraitre entre Miam miam fléau et Colis 22, une brève histoire « Le Brâne » dans un collectif chez Glénat Québec. Cette publication était dans le cadre du concours annuel sous le thème de « Partie de Pêche ». La prochaine parution ne devrait pas autant tardé et ce sera un genre très différent.
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Merci pour le commentaire et la précision. Effectivement, Marsi a publié un petit Le Brâne entre son Fléau et son Colis dont je recommande aussi la lecture.
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