Par Dany Rousseau

La divine comédie de Dante Alighieri (1265-1321) fait partie du patrimoine littéraire mondial. Divisée en trois parties de 33 chants, l’œuvre maîtresse du poète toscan raconte son voyage fictif en enfer, au purgatoire et au paradis. Si les deux dernières parties sont méconnues hors des cercles d’experts, la première, l’Inferno, racontant la traversée des neuf cercles de l’enfer de Dante guidés par le poète antique Virgile, est davantage populaire et fut mille et une fois réinterprétée depuis 700 ans.
Dans En enfer avec Dante (Casterman), l’illustrateur allemand Michael Meier nous offre ici en bédé sa propre version revue et corrigée de l’œuvre. Dante chez Meier est un hipster quarantenaire, dépendant de son téléphone et de sa page Facebook. Au début de l’histoire, comme le Dante du Moyen Âge, il s’égarera dans une forêt pour aboutir en enfer. Pris en charge par Virgile, illustré ici sous les traits d’un chacal rouge, le héros découvrira les neuf cercles de l’enfer dantesque imaginés en forme d’entonnoir. À mesure que les deux s’approcheront du centre, ils seront confrontés à des damnés expiant des péchés de plus en plus graves; les athées dans le premier cercle, les félons et les traîtres dans le dernier.

Si l’œuvre originale n’avait rien de comique, Mieier tente ici d’en faire une véritable comédie ironique et décalée – un peu hipster finalement. L’enfer de l’Allemand reste au final une critique de la société de consommation et du capitalisme. Les damnés seront des courtiers de valeurs mobilières, des vendeurs d’assurance ou des fraudeurs. Les clins d’œil et les interventions comiques de plusieurs personnalités sont nombreux, mais pas nécessairement faciles à saisir. Si l’on peut reconnaitre Sylvio Berlusconi, Chris De Burgh, Hitler ou Pinochet, je remercie sincèrement Wikipédia en ce qui a trait à plusieurs autres. Les gags avec Giordano Bruno ou Walter Ulbricht sont souvent difficile à piger. J’ai été impressionné par l’érudition de l’auteur car En enfer avec Dante fait travailler notre intellect. Même si je savais qui était Dante et ce qu’était La Divine comédie, comme 98 % des gens je ne l’avais jamais lu. J’ai dû me taper des résumés de l’Enfer et lire quelques articles biographiques sur Dante.

En enfer avec Dante reste un objet bizarre et étrange. Le scénario se voulant humoristique ne m’a pas fait rire beaucoup. J’ai apprécié Lui Witong et sa contrefaçon de sacs Louis Vuitton, la gorgone Stasi et les deux démons vantant les avantages de l’énergie nucléaire, mais les gags flirtent souvent avec l’esprit de bottine ou font dans le jeu de mots qui tombe à plat.

Je dois vous avouer que j’ai de la difficulté à dire si j’ai apprécié ou détester le livre de Michael Meier. Ainsi, j’appliquerai une bonne vieille méthode éprouvée (une fois n’est pas coutume).
On aime : a) L’adaptation intelligente, b) les clins d’œil et références subtils qui sollicitent l’attention du lecteur, c) le dessin un brin vintage.
On aime moins: a) L’humour parfois boiteux, b) les longueurs de certaines scènes qui manquent de punchs, c) certains propos souvent difficiles à saisir.
Entre 5 et 9/10
En enfer avec Dante
Auteur : Michael Meier
Éditeur : Casterman (2015)
Page 136