Par Dany Rousseau :

À l’automne 2014 paraissait le premier tome du diptyque Le chant du cygne (Le Lombard). Après un peu plus d’une année, Babouche-Dorison-Herzet ont bien fait leurs devoirs et pondu une suite à la hauteur du premier volet. Le lieutenant Katzinski, le sergent Pat et leurs hommes continuent leur cavale afin de remettre à l’Assemblée nationale leur pétition signée par des milliers de soldats. Si le précieux document atteint Paris, ils espèrent que les parlementaires limogeront enfin le général Nivelle qui continu encore coûte que coûte à sacrifier stupidement la vie de milliers de poilus dans des attaques mal préparées. Poursuivis par l’inquiétant commandant Morvan complètement défiguré par de nombreuses blessures, les commissionnaires vivent des aventures toujours aussi enlevantes.
Si ce deuxième est mené d’une main de maître par les deux scénaristes, j’ai toutefois un bémol à propos du dessin. Lors de ma première critique, j’avais apprécié la marque particulière de Babouche avec ses personnages inspirés du manga. Cependant, pour cette deuxième partie, les aquarelles de l’artiste sont moins efficaces. Les scènes d’actions sont confuses, les cases trop chargées, on ne sait plus où on en est. J’ai dû me reprendre à plusieurs reprises et observer attentivement pour comprendre certains moments cruciaux de l’intrigue. Je n’aime pas non plus la façon dont les couleurs ressortent délavées sur le papier. Malgré tout, si vous avez apprécié comme moi le premier tome, vous aimerez cette conclusion qui applique un baume salutaire sur un dessin franchement agaçant.
7.5/10
Le Chant du Cygne; tome 2
Auteurs : Xavier Dorison et Emmanuel Herzet (scénario) Cédric Babouche (dessin)
Éditeur : Le Lombard (2016)
68 pages

Dès le départ, je dirais que je ne suis pas le public cible pour la prochaine bédé. Prépubliée dans Spirou, Harmony tome 1 (Dupuis) de Mathieu Reynès a toutefois retenu mon attention. S’adressant à un public adolescent, son récit raconte l’histoire d’une jeune fille assaillie par des cauchemars et qui se réveille dans la cave d’un inconnu. À côté d’elle brûle une chandelle posée sur une chaise; dans une assiette, un sandwich et une pomme. L’adolescente a peur et ne comprend pas ce qui lui arrive. Elle ne se souvient de rien, pas même de son nom. Elle apprendra finalement qu’elle se trouve dans la maison de Nita, un géant barbu bienveillant qui semble en connaitre beaucoup sur elle. À mesure qu’Harmony (c’est son nom) se rassure sur les intentions de son logeur, elle découvrira qu’elle possède d’étranges pouvoirs de télékinésies et que sa sécurité est en jeu. On peut reconnaître dans ce résumé quelques références évidentes avec la Carrie de Stephen King, la série Heroes ou Twillinght. Harmony ne réinvente pas le bouton à quatre trous. L’histoire d’un personnage amnésique, possédant des aptitudes surhumaines, poursuivi par des services secrets voulant exploiter ses pouvoirs à des fins malveillantes n’est pas un synopsis révolutionnaire. Mais le récit et le dessin de l’auteur réussissent à nous accrocher et l’on y trouve un certain plaisir. Harmony doit compter trois chapitres et si Reynès continue sur cette lancée, cette bédé jeunesse risque d’être très intéressante pour tout apprenti bédéphile.
8/10
Harmony; tome 1 Mémento
Auteur : Mathieu Reynès
Éditeur : Dupuis (2016)
56 pages

Récipiendaire du grand prix du festival d’Angoulême en janvier dernier, Hermann est un véritable monument de la bédé. Pour son nouvel opus, le vieux routier s’adjoint encore une fois son fils Yves H au scénario. Old Pa Anderson (Le Lombard) nous emporte dans le Sud profond, au cœur du Mississippi en 1952. Si, d’un côté, le soleil brille pour les habitants blancs d’une petite ville anonyme proprette, en contre partie, ce même soleil transforme en étuve les bicoques aux toits de tôle du bidonville noir voisin où vit Old Pa Anderson avec sa femme Old Ma. Malgré le racisme et l’exclusion sociale, le quotidien dans leur taudis pourrait être simple et calme si ce n’était que le couple âgé vit avec un drame qui le hante depuis huit ans. À l’époque, ils élevaient Lizzie, leur petite fille de 16 ans. Un jour elle est sortie et n’est jamais rentrée.
Un matin, Old Ma ne se réveille pas, probablement morte de chagrin. Old Pa est maintenant seul et quelques langues se délient. C’est ainsi qu’il apprend le nom d’un des trois blancs responsables de la disparition de Lizzie et l’on sait dès lors que l’heure de la vengeance a sonné. Ne comptant pas sur la justice qui n’est pas du côté des noirs, Old Pa prend les choses en main.
Si c’est avec plaisir que nous retrouvons le trait western et les ambiances d’Hermann, nous sommes déçus de constater que ces beaux dessins habillent un scénario qui n’est pas à la hauteur. Le thème de la vengeance réparatrice et le contexte du sud-américain ségrégationniste sont archi-exploités. Même si Yves H nous sert objectivement une histoire qui se tient, il n’y a rien dans sa narration qui nous donnera l’impression de ne pas avoir entendu et lu cette histoire cent fois. On termine notre lecture en se disant : c’est bien, mais on oubliera rapidement ce que l’on vient de lire.
6.5/10
Old Pa Anderson
Auteurs : Hermann (dessins) Yves H (scénario)
Éditeur : Le Lombard (2016)
58 pages