La ligne la plus sombre

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source : La ligne la plus sombre, éd. La Pastèque, 2016.

par Mathieu T

Les intellectuels sont de drôles de bibittes. À la fois chimistes parce qu’ils observent de près le monde qui les entoure, philosophes parce qu’ils développent des théories englobantes, cuisiniers parce qu’ils nous font goûter des saveurs inconnues et psychologues parce qu’ils connaissent bien le cerveau humain, eux-mêmes étant de grands angoissés. Il n’est donc pas rare de les voir en vedette dans une bande dessinée, prenons pour exemple le superbe Asterios Polyp (Pantheon Books).

Alain Farah est un écrivain occupé qui profite de ses moments de repos pour aller décanter dans une jolie maisonnette sur le bord de la mer dans le Maine. Un jour, à sa grande surprise, le téléphone sonne, une voix féminine l’interpelle : Radio-Canada a besoin d’un chroniqueur social. Farah, intrigué, accepte l’invitation, sentant qu’il ouvre une porte sur une nouvelle dimension de sa vie.

La ligne la plus sombre, une chouette référence à l’univers de Dune de Frank Herbert, est une chronique autobiographique agréable comme un vent chaud d’automne. Utilisant une narration au « je » simple et directe, le lecteur suit les déambulations mentales de l’écrivain, accrochant au passage des bribes d’actualités (les carrés rouges et les casseroles) ainsi que très beaux moments fantastiques comme la danse des dauphins dans les bureaux bruns de Radio-Canada (si, si). Un véritable récit doux-amer apaisant.

Cette bédé pige aussi une partie de sa force d’évocation dans les superbes dessins noirs et blancs de Mélanie Baillairgé. Elle met bien en évidence la vision que Farah a de la vie, non pas en multipliant les détails à l’infini, mais plutôt en nous donnant une représentation lyrique de la réalité, ce qui donne des très belles pages légèrement abstraites comme celles du bord de mer (page 12-13). De plus, l’ajout à mi-album de feuillets collés au style Gustave Doré contribue à enjoliver notre expérience visuelle.

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source : La ligne la plus sombre, éd. La Pastèque, 2016.

Le seul hic dans cette bédé, et c’est surprenant vu la qualité des propositions de La Pastèque, est que les phrases de la narration placée au-dessus des cases sont mystérieusement tronquées de manière arbitraire, obligeant le lecteur à chercher la suite des propos de l’écrivain à gauche et à droite, nuisant considérablement à la fluidité l’œuvre et au rythme de lecture. Un raté important qui est vraiment dommage.

6.5/10

La ligne la plus sombre

Auteurs : Alain Farah (scénario) Mélanie Baillairgé (dessins)

Éditeur : La Pastèque (2016)

96 pages

 

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