
par Mathieu T
Juan Diaz Canalès est le scénariste de talent derrière les histoires de Blacksad et la reprise de Corto Maltese. Le voici enfin seul au volant et le résultat est étonnant.
Dans le Madrid d’aujourd’hui, Niceto l’octogénaire écoule ses journées avec ses copains d’antan à jouer aux cartes et commettre de petits larcins. Mais voilà que les membres de la gang meurent les uns après les autres. Quel est ce malheureux appel du destin ?
Tout dans cette bédé, du dessin au récit, nous rappelle le génie de Wil Eisner. Le quotidien malheureux des petites gens, la malchance chronique, le Dieu absent, la mort qui rôde, le trait noir et blanc qui décrit des personnages réalistico-comiques. C’est beau, c’est riche, c’est fort et derrière cette histoire banale, un thème à la puissance évocatrice effrayante : vieillir.
Un bel ouvrage.
8,5/10
Au fil de l’eau
Auteur : Juan Diaz Canalès
Éditeur : Rue de Sèvres (2016)
90 pages

Je le dirai jamais assez, la présence de petites maisons d’édition est rafraîchissante dans le portrait de la bande dessinée parce qu’elles osent sortir des sentiers battus, souvent avec succès. The Traveller en est un bon exemple.
Un voyageur raconte son étrange périple à travers les méandres du métro parisien la nuit. De la tour Eiffel au couloir le plus sombre, le lecteur embarque dans un délire assumé.
Mélangeant poésie bilingue et dessins onduleux, les deux auteurs nous proposent une ballade symbolique et onirique tout en gardant la Ville lumière reconnaissable en arrière-plan. Mise en page éclatée, impression surréelle de vie souterraine, dessins blancs sur noir, l’ensemble est une aventure jouissive et réussie pour le lecteur.
Un livre qui se lit rapidement dont les mots et les images restent longtemps en tête.
8/10
The Traveller * Livre 1 – Le labyrinthe cosmique
Auteurs : FFREC (dessins) LPRZ (textes)
Éditeur : Éditions Trip (2016)
76 pages incluant une entrevue avec les auteurs

Cyril Doisneau a une bonne fourchette et il adore s’en servir. C’est aussi un illustrateur des bonnes choses de la table. Il propose ici un recueil de plusieurs de ses chroniques culinaires antérieurement publiées.
L’aventure débute au Pastaga tout près de chez moi. Doisneau fait le tour du propriétaire et disserte menu avec le chef Martin Juneau. Le reste des historiettes est du même acabit : de la visite d’une cuisine de pâtisserie à l’anecdote sur la venue de Mitterand au Québec, tout est propice à discuter boustifaille.
Avec un trait différent pour chaque chronique et parfois l’ajout d’un petit coup d’aquarelle qui rappelle un peu dans l’ensemble celui du regretté Cabu, ce livre est pour les amoureux de la bonne chair. Ici, pas de prise de tête ou de réflexion philosophique. Doisneau décrit avec humour et passion le monde culinaire sous tous ses angles, surtout celui qui se termine dans notre assiette.
Du bonbon.
7,5/10
Carnets de bouffe
Auteur : Cyril Doisneau
Éditeur : La Pastèque (2016)
64 pages

Scott Leblanc obtient enfin une entrevue avec le roi Beaudoin II pour lui parler de ses animaux de compagnie. Mais avec notre jeune héros, rien n’est jamais simple et il mettra les pieds dans un engrenage infernal où une organisation de droite cherchera à remplacer le roi par un sosie qu’elle pourra contrôler à sa guise. Diantre, que d’action !
Sans s’en cacher une seconde, cette bédé est un énorme hommage aux grands personnages de la ligne claire belge (Tintin, Blake et Mortimer, Lefranc, Alix, etc.). Mais un hommage sous la forme d’une gigantesque bouffonnerie qui n’a pas peur du ridicule. Un dessin méga-pastiche d’Hergé sous les yeux, le lecteur suit les aventures de Scott, une poule mouillée niaise et du professeur Moleskine, un savant brillant et violent.
C’est con, épais, un peu iconoclaste, défoulant tellement les personnages et le récit jouent gros. C’est justement son principal défaut : à trop vouloir montrer que l’on rit du genre, le soufflé lève puis s’écrase lamentablement après dix pages.
Non, décidemment l’humour de Gluck et moi, ça fait deux.
5,5/10
Échec au roi des Belges – Une aventure de Scott Leblanc
Auteurs : Devig (dessins) Philippe Geluck (scénario)
Éditeur : Casterman (2016)
46 pages